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La santé des mères repose sur la formation de sage-femmes : Becky, étudiante au Soudan du Sud

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À l’Institut de santé de Maridi, au Soudan du Sud, nous avons rencontré des étudiantes de première et de troisième année qui ont partagé leur histoire et les raisons qui les ont poussés à intégrer cette école. Parmi elles, Achan Buong (tout le monde l’appelle Becky), une étudiante qui devrait obtenir son diplôme de sage-femme cette année, nous accueille en présence d’une mère venue faire vacciner son petit garçon.

Lorsque nous la rencontrons, Becky tient dans ses bras Given, le dernier enfant qu’elle a aidé à naître à l’hôpital de Maridi, dans l’Équatoria occidental, accompagné de sa mère, Susan.

 

Une vocation d’enfance

Dès son plus jeune âge, Becky savait qu’elle voulait devenir sage-femme. Pendant son adolescence en Ouganda, elle a pris conscience à quel point leur travail était difficile. Elle se confie :

« Les sages-femmes à Tonj sont peu nombreuses, et celles qui sont là sont surchargées de travail. Être sage-femme, pour moi, c’est quelque chose de personnel. Ma communauté fait face à de nombreux défis, de la grossesse à l’accouchement. Les défis incluent de longues distances entre les foyers et les centres de santé, ce qui décourage les femmes enceintes de chercher des soins. Les médicaments sont parfois limités. La même sage-femme qui est dans le service doit aussi offrir des services de soins prénatals, des services de planification familiale et des soins postnataux, ce qui est beaucoup pour une seule personne. »

Consciente de cette situation, Becky a aussi compris que cette profession est cruciale pour aider à développer son pays. Elle fut alors convaincue qu’avec ces connaissance, elle pourrait aider de nombreuses familles. Pour cela, Becky savait qu’elle devrait quitter son foyer et traverser le pays pour suivre une formation intensive de trois ans au Maridi Health Science Institute.

« À mon avis, il est important d’avoir davantage de sage-femmes, car plus il y en a, moins il y aura de complications pour les mères et leurs bébés. Sans elles, les nouveau-nés risquent de rencontrer des complications, et il y en a tellement. »

Au Soudan du Sud, les jeunes filles n’ont pas toutes la chance d’aller à l’école ; celles qui le peuvent, peuvent être contraintes de l’abandonner dès qu’approche l’âge où l’on souhaite qu’elles se marient. Becky a eu le courage de dire à ses parents que ce ne sont pas seulement les garçons qui peuvent changer l’avenir ; les filles aussi en sont capables.

Grâce au soutien d’Amref, Becky a pu suivre une formation spécialisée. La formation dispensée couvre des sujets essentiels tels que les soins prénatals, l’accouchement en situation d’urgence, et les soins néonatals.

 

La confiance (en soi), ça se gagne

Cette formation lui a non seulement permis de renforcer ses connaissances mais également de développer une certaine assurance et une compréhension profonde des besoins de sa communauté. Cependant, cela n’a pas été facile pour elle. En y repensant, elle confie :

« La confiance, ce n’était pas mon truc. J’étais le genre de personne qui évitait le regard des autres. Mais en étudiant pour devenir sage-femme, j’ai compris qu’il fallait que j’aie confiance en moi. Pour convaincre une mère, il faut la regarder dans les yeux, et parler avec assurance. Sinon, elle se dira : Ah, cette personne n’est même pas confiante. Pourquoi devrais-je l’écouter ?… Alors j’ai continué à m’entraîner. »

Aujourd’hui, Becky reconnaît que ses compétences en communication, sa capacité à s’adapter et à comprendre les ressentis des autres, sont de réels atouts dans sa carrière.

« J’ai appris les compétences en communication : le langage corporel, le contact visuel, tout cela. J’ai dû m’adapter, et c’est ainsi que j’ai bâti ma confiance. »

 

La naissance de Given : le cordon entre Susan et Becky

L’accouchement de Susan, assisté par Becky, fut un véritable challenge. À cette époque, elle n’était encore qu’étudiante.

« J’ai murmuré à une autre sage-femme, plus expérimentée que j’avais peur. Mais elle m’a dit : Non, c’est le jour que tu attendais, et tu dois le faire. Alors j’ai dit d’accord. J’ai pris de grandes respirations et le bébé est arrivé. C’était formidable. Le bébé, Given, allait bien et j’étais tellement heureuse que mon premier accouchement se passe sans complications. Je suis rentrée à l’école remplie de joie.”

Ainsi, Becky est devenue une personne respectée dans sa communauté par son engagement. Elle est désormais une « championne de la santé ». Elle entretient des liens étroits avec ses patients.

« Ce que j’aime dans le métier de sage-femme, c’est l’interaction avec les autres et le fait de donner la vie. », dit Becky.

Maintenant maman, Susan continue de se tourner vers Becky pour obtenir des informations et des soins pour elle et son bébé. La relation de confiance qu’elles ont développée dès les premiers jours de la grossesse reste précieuse. Cela a notamment été le cas lorsque Susan a été testée positive au paludisme. Elle a immédiatement appelé Becky, qui l’a orientée vers un établissement de santé pour bénéficier d’un traitement adéquat.

 

La réduction des risques de mortalité passe aussi par un meilleur accès à l’information

La santé maternelle et néonatale sont étroitement liées. Toutes les femmes doivent avoir accès à des soins de qualité pendant la grossesse, ainsi qu’avant et après l’accouchement. Une prise en charge en temps opportun est cruciale pour prévenir les décès liés aux complications. Il est tout aussi important d’encourager les mères à consulter régulièrement pour elles-mêmes et pour leurs enfants, surtout ceux de moins de cinq ans, afin de garantir leur bien-être et leur sécurité.

 

Lutter contre une situation intolérable

Les femmes et les enfants d’Afrique subsaharienne sont les plus exposés au monde au risque de décès pendant la grossesse et l’accouchement. Les dernières données disponibles suggèrent que dans la plupart de ces pays, seulement 68 % des mères sont assistées par un personnel de santé qualifié pendant leur grossesse.

Selon l’OMS, 80 % des décès lors de l’accouchement pourraient être évités grâce à la formation et à l’équipement. Or, la pénurie d’infirmières et de sage-femmes, conjuguée au manque de ressources, entraîne une surcharge de travail pour le personnel. Cette surchauffe des systèmes de santé dissuade souvent les jeunes femmes à se rendre dans les centres de santé, souvent jusqu’à ce qu’il soit trop tard.

C’est notamment le cas au Soudan du Sud, où l’on dénombre environ 1 200 décès de femmes enceintes pour 100 000 naissances. Dix ans après son indépendance, le pays reste l’un des États les moins pourvus en équipements et en personnels de santé. Le contexte de conflits et de crises humanitaires récurrentes ne fait qu’aggraver l’urgence : les femmes enceintes et les enfants déplacés en raison du conflit sont les plus vulnérables dans cette situation chaotique.

Amref Health Africa reste présent au Soudan du Sud et continue de former les sage-femmes comme Becky pour lutter contre les risques de mortalité maternelle et infantile.

 

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